Comment gérer une famille recomposée

Lorsqu’elle est réussie, la famille recomposée est source de joie, de partage et de richesses. Mais, au quotidien, c’est souvent loin d’être idyllique. Jalousies à arbitrer, rivalités à gérer, difficultés à trouver sa place, interrogations sur l’autorité, sont autant de défis à relever. Vivre heureux à plusieurs sous le même toit, c’est faisable. Mais, cela demande beaucoup de temps, de la patience et beaucoup de diplomatie.

Des débuts laborieux

On ne choisit pas sa famille, dit-on, mais on choisit encore moins sa famille recomposée. Déjà, il serait sage que le parent ne présente pas trop vite sa/son partenaire à ses bambins. Il n’y a aucune urgence. Mais alors, comment faciliter cette fatidique rencontre ? « La préparation se fera bien avant le mariage. Tout devra être progressif mais sans aucun sentiment de culpabilité ni de gêne ! », explique notre psychologue (Dr. Amal Chabach). Partager son intimité avec des « étrangers » aussi gentils soient-ils, cela peut relever de l’insoutenable si la séparation parentale n’a pas encore totalement été digérée. En réponse à votre envie de lui offrir une « nouvelle » famille, votre enfant cherchera systématiquement à mettre en échec cette nouvelle relation en usant de colère, d’agressivité et de rébellion. La clé de la réussite ? Partager des choses au quotidien (repas, sorties, promenades, voyages…), apprendre à être ensemble pour mieux se connaître et s’apprécier.

Comment trouver sa place ?

Le respect des territoires affectifs de chacun est essentiel. « Le mariage est déjà en lui même une grande épreuve où les deux partenaires doivent s’entraider pour la réussir. Redémarrer une nouvelle famille avec des blessures passées est un plus grand challenge. Si les deux conjoints n’ont pas fait un travail sur eux-mêmes en apprenant de leurs erreurs passées, ils tomberont encore une fois dans le cercle infernal des souffrances de leurs deux egos et ceux de leurs enfants mutuels. », poursuit la psychologue. Une famille qui se recompose, ce sont deux univers qui s’entrechoquent avec des habitudes et des valeurs différentes. Ces différences éducatives, voire culturelles, sont source de disputes, car les enfants les vivent comme des injustices. Il est donc nécessaire d’harmoniser les modes de vie en instaurant de nouvelles règles équitables pour tous. Mais, il faut aussi savoir « fermer les yeux » sur l’instant, avant d’en reparler à tête reposée. Beaucoup de beaux-parents décrivent un sentiment d’exclusion de la part des enfants qui n’acceptent pas qu’un étranger s’immisce dans leur vie, encore moins qu’il exerce sur eux toute forme d’autorité. Or, ce n’est pas en les couvrant de cadeaux ou en cédant à tous leurs caprices, qu’on gagnera leur affection. D’une manière ou d’une autre, sans se substituer au père ou à la mère, il faut se faire respecter et obéir. « Cette nouvelle autorité doit être synonyme de respect et de communication, mais surtout pas de punitions ni de limitations. Elle passera obligatoirement par l’accord du partenaire. Aucune décision ou action ne sera entreprise sans son accord », souligne notre expert.

Le temps calme la tempête

Que faire si la haine perdure ? « Ne pas aimer ne sous entend pas ne pas respecter ou ne pas vivre avec. L’adulte concerné s’armera de patience et expliquera en faits et gestes qu’il ne remplacera jamais son vrai père ou sa vraie mère, tout en essayant de lui laisser l’occasion de se rapprocher de lui doucement mais surement ». Pour acquérir cette autorité, il faut donc d’abord établir un rapport de confiance avec l’enfant. Mieux vaut prendre le temps de s’apprivoiser l’un à l’autre. Et, quel que soit le cas de figure, le beau parent doit toujours sentir le soutien inconditionnel de son/sa partenaire. Il est important de multiplier les rencontres dans des contextes agréables et ludiques pour que l’enfant se familiarise avec le nouveau venu. Doit-on traiter son enfant et celui de l’autre de la même façon ? C’est la question qui revient souvent. Même si, consciemment ou non, on favorise le sien, il est impératif d’être un parent juste et de ne privilégier personne. « Surtout en donnant à chacun équitablement du temps, de l’attention et de l’amour », poursuit notre spécialiste. C’est en s’efforçant d’être impartial, à l’écoute de chaque enfant, que l’on créera les conditions d’une bonne entente entre eux. Ceci dit, pour éviter toute jalousie, des rendez-vous en tête à tête avec son enfant permettent de lui montrer que son statut n’est pas menacé.

Comment gérer les conflits ?

Votre petit monstre refuse de faire des efforts ? Faites preuve d’indulgence. Laissez-lui une période d’adaptation pour apprivoiser ses nouveaux « frères et sœurs » qu’il n’est d’ailleurs pas obligé d’aimer tout de suite. Surtout ne paniquez pas si les disputes s’enchainent. Au début, tant qu’elle reste gérable, l’agressivité est une réaction naturelle face à une situation instable. Par contre, dès le départ, vous devrez poser des limites : il est hors de question d’accepter des comportements violents. D’un autre côté, entretenir des rapports cordiaux et civilisés avec l’ex est souhaitable. Car, si l’enfant devient l’objet central des disputes pour camoufler des ressentiments d’adultes, il en sera la première victime. Le petit ne doit jamais être pris en otage dans des querelles d’adultes. Par crainte de trahir sa mère ou son père, sa loyauté lui interdira d’avoir de l’affection pour son beau-père ou sa belle-mère. Or, son bien-être doit passer bien avant l’orgueil ou les rancœurs. Alors comment trouver l’harmonie et l’équilibre ? « Avec énormément d’amour, de patience et de persévérance, tout en gardant et en clarifiant le rôle de chacun et les limites de chacun. Le nouveau couple a besoin de consolider sa communication et sa confiance mutuelle. C’est primordial pour l’équilibre de la tribu ! », conclut notre psychologue.