Société

L’association Insaf lance une campagne de sensibilisation contre le travail des mineurs

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« Employer une petite bonne mineure est passible de prison. Informons les employeurs et libĂ©rons des milliers de petites filles d’un travail illĂ©gal« , c’est ainsi que l’Institut National de SolidaritĂ© Avec les Femmes en DĂ©tresse (INSAF) appelle toute personne Ă  participer Ă  une campagne de sensibilisation contre le travail des enfants suite Ă  la promulgation de la loi 19-12 entrĂ©e en vigueur le 2 octobre.

Que dit la loi 19-12 et plus prĂ©cisĂ©ment l’article 23?

La loi 19-12 a Ă©tĂ© promulguĂ©e et son article 23 mentionne qu’une personne qui emploie un enfant de moins de 16 ans est passible de 25 Ă  30 000 dirhams d’amende. Il ajoute qu’en cas de rĂ©cidive, ces amendes sont doublĂ©es et l’employeur est passible d’un Ă  trois mois de prison.

Afin de faire connaitre au plus grand nombre cette nouvelle loi qui protĂšge les mineurs et sanctionne les employeurs, Insaf appelle Ă  diffuser largement sur les rĂ©seaux sociaux cette information. Il faut que « l’article 23 soit connu de tous et, qu’au vu de la gravitĂ© des peines, il inquiĂšte les employeurs d’enfants et permette de libĂ©rer des milliers de petites bonnes. Nous serons fiers d’avoir pu les protĂ©ger« , martĂšle l’association dans un communiquĂ© parvenu Ă  la presse.

Campagne de sensibilisation INSAF lancée sur les réseaux sociaux

LancĂ© le 10 octobre 2018, cet appel adressĂ© aux mĂ©dias et Ă  toute personne de bonne volontĂ© espĂšre former une grande chaĂźne de solidaritĂ© qui aura pour consĂ©quence de sensibiliser le plus grand nombre et participer Ă  la libĂ©ration de l’une des milliers de petites bonnes employĂ©es actuellement illĂ©galement au Maroc.

Pour aborder concrĂštement la situation actuelle et montrer, tout aussi concrĂštement, les rĂ©sultats que des actions menĂ©es sur le terrain peuvent produire, Meriem Othmani, prĂ©sidente d’INSAF, a rĂ©uni autour d’elle de nombreux partenaires engagĂ©s dans ce combat. Le volet lĂ©gal a Ă©tĂ© Ă©voquĂ© ainsi que les souffrances physiques et psychiques qui se cachent derriĂšre les chiffres et les portes fermĂ©es. Omar Saadoun, responsable de la lutte contre le travail des enfants au sein d’INSAF a prĂ©sentĂ© deux bacheliĂšres, NaĂŻma et Fatema qui, arrachĂ©es au travail domestique, ont repris leur cursus scolaire, et surtout leur vie, en main.

L’emploi des mineurs, une rĂ©alitĂ© difficile et des chiffres affligeants

Selon une Ă©tude nationale rĂ©alisĂ©e en 2009 par le Collectif pour l’Ă©radication du travail des petites bonnes, elles seraient des dizaines de milliers ĂągĂ©es de 8 Ă  16 ans Ă  travailler comme domestique au Maroc. « Une forme de traite humaine qui perdure« , selon INSAF.

« La position de faiblesse des parents ainsi que l’absence de contrat explicite ouvrent la porte Ă  tous les abus et fragilise la position des petites filles qui sont soumises au bon vouloir de leurs employeur(e)s, forcĂ©es Ă  travailler de l’aube au coucher du soleil, sans soins mĂ©dicaux et, bien souvent, en devant se contenter des restes de nourriture. L’actualitĂ© de ces derniers mois nous a rappelĂ© de maniĂšre dramatique que certaines sont sujettes Ă  des violences quotidiennes, voire aux pires sĂ©vices. Elles subissent en silence, tiraillĂ©es entre le devoir d’aider leur famille et l’envie d’aller Ă  l’école. Et si la tradition ancienne d’envoyer son enfant se former trĂšs jeune pouvait avoir, autrefois, un sens, ce n’est plus le cas aujourd’hui oĂč l’enseignement primaire est gĂ©nĂ©ralisĂ© et, faut-il le rappeler, obligatoire. Seule l’école peut leur offrir des perspectives d’un avenir meilleur. Seule l’école peut les sauver« , souligne l’association.

Il est Ă  noter qu’employer une enfant mineure est dĂ©sormais un dĂ©lit punissable de prison et un crime moral.

Le but? Remettre les petites bonnes sur le chemin de l’Ă©cole

Il existe aujourd’hui des programmes pour accompagner les jeunes filles Ă  se rĂ©insĂ©rer dans le cursus scolaire.

 «Quand nous avons commencĂ© Ă  travailler avec les mĂšres cĂ©libataires, nous avons constatĂ© que 45% des mamans prises en charge par INSAF Ă©taient d’anciennes petites bonnes. C’est ce qui nous a incitĂ© Ă  concevoir un programme pour rĂ©pondre Ă  cette problĂ©matique», explique Meriem Othmani, fondatrice-prĂ©sidente d’INSAF.

Depuis 2002, INSAF a initiĂ© un programme de parrainage qui consiste Ă  ramener la petite fille dans son foyer, la rĂ©intĂ©grer Ă  l’école et la soutenir en lui achetant des fournitures scolaires et en octroyant Ă  ses parents une bourse scolaire mensuelle de 250 dhs. Des cours de soutien peuvent aussi ĂȘtre prodiguĂ©s si la petite fille a besoin d’une mise Ă  niveau. Enfin, un hĂ©bergement est Ă©galement envisageable durant ses annĂ©es de collĂšge et de lycĂ©e. Et ça marche. Le programme, dĂ©ployĂ© Ă  Chichaoua, El KelĂąa, Al Haouz et bientĂŽt Taza, a permis Ă  400 jeunes filles de reprendre leur parcours scolaire.

«Actuellement, 16 jeunes filles ont eu leur baccalaurĂ©at dans la rĂ©gion d’Imintanout et 31 viennent d’ĂȘtre sauvĂ©es et sont en cours de rĂ©intĂ©gration sociale dans la rĂ©gion d’Al Haouz»,ajoute Meriem Othmani qui est bien dĂ©cidĂ©e Ă  ne pas s’arrĂȘter lĂ  puisqu’une premiĂšre «Dar INSAF», destinĂ©e Ă  hĂ©berger des jeunes filles sera inaugurĂ©e Ă  Talat N’Yaaqoub, Ă  30 km de Ouirgane, ce mois d’octobre!

Fatima et NaĂŻma font partie de ces jeunes filles, arrachĂ©es par INSAF au travail de petite bonne commencĂ©e, l’une Ă  l’ñge de 9 ans et l’autre Ă  7 ans. Toutes deux ont obtenu leur bac cette annĂ©e. Fatima qualifie le jour oĂč elle a rĂ©ussi son bac comme « le plus beau jour de ma vie. Avec ma sƓur, nous sommes les premiĂšres de la famille Ă  Ă©tudier » Aujourd’hui, Fatima a 22 ans. Elle Ă©tudie Ă  l’UniversitĂ© Caddi Ayad et vit dans un petit appartement Ă  Marrakech qu’elle partage avec d’autres filles qui ignorent son passĂ©. « Maintenant, le plus important, c’est mon avenir. Il est temps que je devienne maĂźtresse de ma vie » insiste-t-elle.

GrĂące Ă  l’intervention de chacun, simple citoyen et institution, ces deux vagues toucheront des millions de personnes et initieront une spirale vertueuse d’une ampleur et d’une force inĂ©dites, capable, de libĂ©rer ces milliers d’enfants.

Selon le dernier rapport du Haut-commissariat au Plan (HCP), sur les 7.049.000 enfants ùgés de 7 à 17 ans au Maroc, 247.000 exerceraient un travail. Malheureusement, le HCP ne communique le nombre de petites bonnes que ce chiffre inclut.

Qui est INSAF?

Depuis prĂšs de 20 ans, l’Association contribue Ă  l’avĂšnement d’une sociĂ©tĂ© marocaine qui garantit Ă  chaque femme et Ă  chaque enfant le respect de leurs droits dans un environnement digne et responsable Ă  travers :

  • l’hĂ©bergement, l’accompagnement administratif, juridique, mĂ©dical et psychologique, la formation, la rĂ©insertion sociale et professionnelle des mĂšres cĂ©libataires et leurs enfants.
  • la sortie du travail domestique, la protection, la rĂ©insertion en famille et Ă  l’école et le suivi social et pĂ©dagogique des filles mineures, des « petites bonnes ».
  • la sensibilisation et le plaidoyer pour le respect et l’amĂ©lioration des droits des femmes et des enfants.

INSAF a Ă©galement pu venir en aide Ă  plus de 10 000 bĂ©bĂ©s sauvĂ©s de l’abandon et Ă  prĂšs de 400 filles retirĂ©es du travail domestique et rĂ©insĂ©rĂ©es dans leurs familles et Ă  l’école.

 

 

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