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WMN PWR : Hicham Lasri nous parle de sa réflexion autour du statut de la femme (INTERVIEW)

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En octobre dernier, la photo d’une femme en mini-burqa, jambes dĂ©nudĂ©es et chaussĂ©e d’escarpins vertigineux arpentait la pelouse du festival L’Boulevard sous les regards perplexes, accusateurs, rĂ©probateurs ou encore amusĂ©s des festivaliers avait fait le buzz. Loin d’une nouvelle tendance, il s’agissait d’une scĂšne extraite de son prochain court mĂ©trage, « The Perfume », le premier volet d’une trilogie intitulĂ©e WMN PWR (women power). Le rĂ©alisateur iconoclaste vient de le dĂ©voiler sur Youtube, totalisant en quelques jours plus de 50 000 vues.  «The Perfume», est issu d’une rĂ©flexion du rĂ©alisateur Hicham Lasri autour du statut de la femme dans la sociĂ©tĂ©.  Plurielle a rencontrĂ© ce trublion du cinĂ©ma marocain avant qu’il ne s’envole direction Bruxelles pour prĂ©senter Headbang Lullaby, son dernier long mĂ©trage en lice pour le Festival mĂ©diterranĂ©en.

 

 

Purielle: La femme est cƓur de cette trilogie, pourquoi ?

 

 

Hicham Lasri: « J’ai commencĂ© Ă  travailler sur quelques idĂ©es de films, ça part d’idĂ©es qui m’ont rĂ©veillĂ© la nuit autour de la femme, de la situation de la femme sans jamais aller dans ce que je dĂ©teste, c’est le premier degrĂ©. C’est-Ă -dire que prĂ©senter les choses au premier degrĂ©, la larme au coin de l’Ɠil tout en Ă©tant dans une Ă©criture un peu plus froide, provocatrice, sexy
 Cela participe Ă  ma recherche en tant qu’homme vivant au Maroc « qui a une femme, une sƓur, une mĂšre, une fille
 qui doit aussi cogiter cette position lĂ  qu’on pense facile Ă  rĂ©flĂ©chir, or ce n’est pas du tout le cas. »

 

The Perfume, femme et libre de l’ĂȘtre

 

 

Une femme en mini-burqa est assez paradoxal, comment l’expliquez-vous ?

 

 

« Cet Ă©tĂ©, je me suis lancĂ© dans l’écriture de « WMN PWR » une trilogie autour du statut de la femme dans la sociĂ©tĂ©. The Perfume, Le premier volet que j’ai postĂ© dimanche, explique comment l’homme marocain a envie d’avoir une femme Ă  la fois pure tout en Ă©tant p***, comme on a envie d’avoir une femme qui soit trĂšs belle mais Ă  la fois qu’on n’a pas envie que les gens regardent. »

 

Ceci n’a donc rien à voir avec la religion ?

 

Finalement ce n’est pas un jugement sur le statut de la femme en burqa ou la femme voilĂ©e, ce qui m’a intĂ©ressĂ© c’est de faire une sorte d’expĂ©rience sociale en balançant cela au milieu des gens.  Les gens que l’on voit Ă  la fin ce sont des gens qui Ă©taient sur place, on Ă©tait presque dans une logique de tĂ©lĂ© rĂ©alitĂ© c’est-Ă -dire que j’ai lancĂ© la comĂ©dienne Imane Zriouali dans la foule.» explique le rĂ©alisateur qui a choisi une bande son assez originale.

 

Il y a un mélange des genres musicaux, quel est leur sens ?

 

« Je trouvais intĂ©ressant que la premiĂšre partie musicale reprenne « Talaa Al Badrou Alayna» et puis qu’ensuite on change de registre avec cette chanson que je trouve formidable de Lazy Wall qui parle finalement de bousbir, d’un bordel qui Ă©tait Ă  Casablanca, qui parle des femmes, qui parle aussi de cette idĂ©e lĂ  de fĂ©minitĂ© bafouĂ©e, commercialisĂ©e et de martyr de femmes  »

 

C’est une expĂ©rience sociale donc ?

« Pour moi la partie la plus intĂ©ressante, c’est-Ă -dire par rapport Ă  ce cĂŽtĂ© scientifique que j’ai envie de donner c’est de voir comment les gens rĂ©agissent Ă  l’image quand ils regardent passer la fille, ceux qui sont en colĂšre, ceux Ă  qui sa pousse Ă  la rĂ©flexion, ceux qui discutent entre eux pour essayer de comprendre et forcĂ©ment ca a gĂ©nĂ©rĂ© tout le buzz qu’on sait, une fois que l’image a fuitĂ©. Donc pour moi maintenant j’ai Ă©normĂ©ment d’informations pour la suite de mon travail et puis on a un petit film qui est un court mĂ©trage qui explore une sorte de facette Ă©trange avec beaucoup de panache, j’essaye de ne pas faire un film de tiers-mondiste, le but c’est de faire un film avec des c***, avec un cƓur, avec une vraie recherche, un vrai travail sur le champs et le hors champs, avec un vrai langage de cinĂ©ma finalement. »

 

De quoi traitent les volets suivants ?

 

« Il y a un autre film que j’ai tournĂ© pour Hoba Hoba Spirit, pour le prochain album du groupe qui fait 20 minutes avec la mĂȘme comĂ©dienne qui parle de façon trĂšs allĂ©gorique d’une femme qui est avec un mec qu’elle doit supporter Ă  la fois financiĂšrement,  moralement, comme poids social
 Et on a trouvĂ© une image trĂšs simple et extrĂȘmement parlante d’un nain qui s’accroche Ă  sa jambe pendant qu’elle marche. Durant tout le film, la fille est en train de marcher et de chercher le propriĂ©taire de cet homme. Illustrer l’homme en nain c’est une maniĂšre de rĂ©duire cette masculinitĂ© toxique que l’on expĂ©rimente en fait ici : le cotĂ© viril, macho, la femme doit faire ça, un homme c’est dĂ©fini aussi par « il ne faut pas qu’il soit gentil avec sa femme »  qui sont en fait un hĂ©ritage Ă  un moment donnĂ© il faudra qu’on le rĂšgle pour qu’il ne reste plus accrochĂ© quelque part dans nos vies. »

 

L’homme, sans mauvais jeu de mots, le mal de notre sociĂ©té ?

 

Le troisiĂšme volet concerne effectivement le harcĂšlement dans la rue.  C’est l’histoire d’une fille qui marche dans la rue et qui se fait harceler plusieurs fois, et Ă  chaque fois qu’elle se retrouve dans cette situation, la femme dĂ©fie le harceleur en duel comme si on Ă©tait au 18Ăšme siĂšcle, donc elle le frappe, mais c’est avec un gant de hammam. A la fin tous ces gens lĂ  vont se retrouver sur une digue pour le duel, c’est filmĂ© comme un vrai western avec un travail sur le look qui est trĂšs important et aussi une maniĂšre (les gens vont apprĂ©cier le film) s’ils partent avec une volontĂ© de rĂ©flĂ©chir la position de chacun. Siffler une femme dans la rue peut ĂȘtre un truc banal ou banalisĂ© et en mĂȘme temps cela remet plus en question la sociĂ©tĂ©.

 

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