Zainab Fasiki : Une féministe qui crée des Bandes dessinées

Libre, épanouie, indépendante et travailleuse, Zainab Fasiki est une jeune femme qui sait ce qu’elle veut.
Zainab est née et a grandi à Fès, une fois le bac scientifique en poche, elle intègre l’Ecole supérieure de technologie de Fès et devient technicienne supérieure en mécanique avec mention très bien. Motivée et ambitieuse, la scientifique, part s’installer à Casablanca pour devenir ingénieur d’Etat en mécanique. A peine âgée de 22 ans, Zainab accorde une place importante à sa passion pour le dessin, elle est aujourd’hui en train de se lancer pour produire elle-même sa propre bande dessinée, engagée, drôle et surtout féministe. Interview.

 

 

Zineb Achraf: Depuis quand dessines-tu ?

 

 

Zainab Fasiki: Je dessine depuis l’âge de 4 ans, et j’ai eu ma tablette graphique quand j’ai eu 16 ans. C’est à ce moment-là que j’ai commencé le dessin sur des logiciels avec les tutoriels sur internet.
Quand j’ai déménagé à Casablanca en 2014, j’ai participé dès le premier jour à plusieurs festivals, j’ai été acceptée pour dessiner avec le collectif Skefkef et faire partie d’autres organismes. Cela m’a aidé à élargir mon réseau et à rencontrer des gens qui m’ont aidé à bien maîtriser mes compétences.
Peux tu nous parler de ta passion pour la BD ? En as-tu d’autres ?

 

 

 

Je dessine des bandes dessinées et je suis autodidacte parce que j’ai appris sur le tas. J’ai créé ma patente professionnelle en 2016 et je travaille actuellement sur OMOR, mon prochain album sous licence libre qui traite de la situation actuelle de la vie des femmes marocaines. J’ai une autre passion, c’est l’art numérique avec les circuits DIY électroniques. J’ai d’ailleurs déjà animé des workshops avec des lycéens pour les initier aux sciences physiques.

En quoi es-tu féministe ?

 

Je dessine souvent les femmes dans mes illustrations et mes BD. Je parlais souvent des stéréotypes à propos des femmes marocaines de façon comique. La liberté d’expression est importante pour moi car j’illustre souvent des corps nus de femmes que je publie sur mes réseaux sociaux et ma page.


Quelle est la place des femmes pour toi aujourd’hui au Maroc ? Comment souhaiterais-tu que les choses évoluent ?

 

 

 

Mon objectif, est de rendre à la femme arabe sa liberté d’expression loin de la société machiste qui essaye toujours de limiter sa créativité. Les femmes arabes ne doivent plus avoir peur de leurs talents. D’après mon expérience, j’ai décidé de faire mon propre projet, de créer mon livre et de le distribuer, ainsi j’aimerai bien organiser des workshops avec des femmes, leur présenter le livre et les motiver à faire leurs propres projets. Mon album sera terminé dans deux mois normalement, je pars souvent en voyage et me retrouve dans des réunions avec plusieurs organisations pour trouver des partenaires et des soutiens afin de pouvoir imprimer ma bande dessinée prochainement.

 
Parle-nous un peu de ta BD, Omor

 

 

 

Le Maroc est un pays ouvert, la femme à de nombreux droits si on compare avec d’autres pays arabes, mais il reste toujours des inégalités dans les milieux ruraux. Il arrive encore qu’on entende des cas de viol, d’harcèlement sexuel dans les espaces publics, et plusieurs femmes sont encore contrôlées par leurs familles au nom de la religion et de l’honneur…. Je souhaite traduire toutes ses figures dans ma prochaine BD OMOR, et regrouper plusieurs femmes dans plusieurs centres afin de les encourager à développer leurs passions et à devenir des femmes indépendantes par leur propre créativité.

 

 
La BD OMOR, est un projet que j’ai toujours rêvé de créer, mais je n’avais jamais le temps suffisant pour le commencer avec mon cycle d’études chargées, mes voyages et mes projets. C’est un livre qui contient plus de 70 pages, avec des posters entre les chapitres ainsi que des articles décrivant la vraie situation des femmes au Maroc.

Comment t’es venue l’idée d’écrire sur les femmes ?

 

 

J’ai eu cette idée, parce que moi-même j’ai des soucis dans mon quotidien dans les espaces publics. Dans ma carrière de Génie Mécanique, j’ai toujours été la seule fille quand j’ai effectué des stages et au sein des sociétés lors des festivals, ainsi j’ai toujours vécu et vu des histoires de souffrance de mes amies. C’est ce qui m’a motivé à créer un livre qui parle des femmes.

 
Skefkef, qu’est-ce que c’est ? Peux-tu nous en parler ? Quelle a été ton rôle dans cette collaboration ?

 

 

Skefkef est le premier fanzine Marocain sous Licence ouverte qui regroupe à chaque numéro des artistes marocains de BD et de scénario en invitant à chaque numéro un artiste d’un pays arabe, pour créer après chaque résidence artistique une BD qui traduit plusieurs thèmes marocains.
Tout est créé et vendu au sein de l’Uzine à Ain Sbaa. J’ai été chanceuse de collaborer avec un tel magazine depuis 2 ans. C’est aussi ce qui m’a poussé à développer mes compétences à chaque Numéro. J’ai réalisé des pages de BD dans plusieurs Numéros de Skefkef.

 

 

As-tu déjà reçu des prix ou des récompenses pour tes talents de bédéiste ?

 

 

J’ai le Behance appreciation award depuis 1 an, un prix international qui motive les artistes de création visuelle depuis le contenu de leur portfolio.

 

 

 

Si tu devais laisser un message aux femmes marocaines, lequel serait-il ?

 

 

Ne laisse jamais la société limiter ta créativité. Certes, la vie est difficile pour une femme arabe dans un pays arabe, mais tout pourra changer par ton action, détermination et volonté. Développe ta carrière par toi-même, n’attends jamais un homme pour te libérer ou te traiter comme une princesse. Tu es déjà née libre et capable de devenir indépendante par ton propre travail acharné. Et si jamais tu n’as pas accès à tes droits comme être humain, demande tes droits immédiatement!