La vie rêvée de Fafou: Martin Luther King, Kery James et mon rêve

“I can’t breathe! I can’t breathe !”… J’éteins la télé choquée par les images atroces d’Eric Garner que l’on voit mourir sous les genoux de policiers américains, en disant ces derniers mots…il est temps d’aller essayer de voler quelques moments de répit à Morphée.

Comme tous les soirs, mon dernier geste avant de dormir, est de lancer la musique en aléatoire sur mon ordinateur. Je me sens partir dans un sommeil bien mérité quand commence « Musique Nègre », titre du dernier album de Kery James qui a la capacité de donner la chair de poule à chaque cellule de mon corps.

Cette réponse à Henry de Lesquen – candidat aux primaires présidentielles françaises qui compte éliminer la « musique nègre » des ondes s’il est élu en musique, me laisse sans voix… comme le sera de Lesquen. Le clip passe sur écran géant dans ma tête. Les références à Rosa Parks, à Malcolm X, aux sportifs américains montés sur le podium des Jeux Olympiques poings levés en signe de soutien aux Black Panthers sont fortes.

«Donc rien ne s’est arrangé ? » me dit d’une voix grave mais rassurante Martin Luther King, qui était à côté de moi tout ce temps, à regarder la vidéo. Je lui explique que c’est plus compliqué que ça, que son combat n’a pas été vain évidemment : un jour de novembre 2008 le peuple américain a tout de même élu le premier président noir du pays !…

Seulement, les mentalités semblent avoir régressé sérieusement ces dernières années, d’où le besoin de cette piqûre de rappel. Il est interloqué par le fait que cette chanson soit une réaction aux dires d’un homme politique français. « Le pays des Droits de l’Homme…really ? ».

 Je me mets à lui raconter… Alton Sterling, Philando Castille aux Etats-Unis entre autres (trop nombreux) malheureux. Adama Traoré en France, les chasses à l’homme de subsahariens en Lybie…jusqu’en Afrique le racisme est venu semer la zizanie entre les hommes. Le comble.

Je lis la douleur dans ses yeux, je regrette de lui avoir dit tout ça, alors j’essaie de me rattraper. Mais comment ? En lui expliquant que tout ira bien ? Que Beyoncé et son Formation Tour ont les choses en main ?

Le rêve prend des airs de cauchemar, Trump aux portes de la Maison Blanche, Marine Le Pen à celles de l’Élysée, l’image donne la nausée à mon inconscient.

Je suis tellement curieuse, je voudrais savoir si l’adage dit vrai: « il doit se retourner dans sa tombe le pauvre »… Je pose la question, presque malgré moi. Dr King, très sérieusement m’explique que cela va au-delà de se retourner, que ça tient plus du triple salto arrière, ce qui l’étonne parce qu’il n’était pas particulièrement bon en gymnastique de son vivant.

Il réussit à me faire rire, je suis désolée de le voir en rêve et d’avoir à parler de choses si désolantes. Mais je fini par lui dire que si un jour il fait un autre rêve, j’y ferai un saut à mon tour et on parlera Blues et Obamacare, en osant lui tapoter l’épaule. Il repart en souriant et me lâche avant de disparaître: Quelle insolence !